Théologien

De Christ-Roi
Aller à la navigation Aller à la recherche

"Homme de doctrine, [...] homme de l'intelligence dogmatique et de la contemplation; il voit, il décrit le christianisme par le dedans, par l'intérieur; dans ce sanctuaire de la foi où il est entré, il établit sa demeure in aeternum; il y vit abrité contre les orages du dehors, baigné dans cette lumière féconde et rafraîchissante de la révélation; il l'étudie autant avec amour et piété qu'avec attention, autant par le coeur que l'esprit."

(Source: Abbé Augustin Aubry, Contre le modernisme, Etude de la Tradition, le sens catholique et l'esprit des Pères, Pierre Tequi Editeur, Gand 1927, réédité aux ESR, p. 182.)


Le sens théologique ou sens de la foi du théologien

"Le sens dogmatique ressemble à ce don, que la connaissance des corps organisés et de leurs lois a donné aux naturalistes de recomposer un être complet sur un seul de ses ossements. Le théologien, avec des données incomplètes, mais armé de ce sens intérieur, acquis par la méditation du surnaturel, l'étude de la foi et la connaissance des voies et des habitudes de Dieu, arrive, comme d'instinct, au vrai, le eprçoit, le sent, par une sorte de parenté spirituelle appelée si bien par Lacordaire le don de voir dans l'infini, et qui est une des suprêmes consoltations de l'homme, le plus précieux avant-goût ders visions célestes.

Le sens théologique révèle au théologien la vérité dogmatique, sans avoir besoin deu secours des preuves dont elle peut disposer; en sorte que, comme de Maistre encore, il peut dire souvent et avec vérité: "Je ne le sais pas, mais je l'affirme!"

N'est-ce pas le sens théologique qui a conduit saint Alphonse de Liguori, à travers des preuves mal concluantes, faibles ou fausses, mal choisies, à une conclusion vraie et ferme; ce même sens qui a fait incliner les docteurs vers le dogme de l'Immaculée Conception, longtemps avant qu'on eût réuni, formulé, mis dans leur lumière les arguments de cette doctrine, quelquefois même à l'encontre de certaines opinions qu'elle contrariait ?"

[...] Le sens théologique permet de saisir immédiatement, par une sorte d'intuition ou d'instinct surnaturel, le grand côté de chaque dogme et le lien par lequel il se rattache au tronc de la révélation; il laisse si bien apercevoir, à la base de chaque vérité, le grand principe par où elle sort de ce tronc, qu'à chacune de ses thèses le théologien se sent en tête du christianisme; dans chaque notion il trouve un point de vue synthétique sous lequel il est capable d'embrasser d'un coup d'oeil tous les objets secondaires du dogme; à chaque pas, il se croit arrivé au principe le plus général, le plus profond de la foi, à ce grand article fondamental d'où doivent découler tous les autres, par mode de conclusion, dans la pensée même de Dieu et, par conséquent, dans l'analyse de la parole révélée qui n'est que l'expression de ce que l'intelligence peut saisir de la pensée divine. Se croyant arrivé au principe le plus général, le théologien n'est pas le jouet d'une illusion; car telle est bien la qualité propre des vérités de la foi, vues dans leur profondeur, que chacune d'elles embrasse toutes les autres. [...] Ainsi en est-il de la foi, pour la raison que nous avons dite, parce que la foi c'est une vision de Dieu à la lumière même de Dieu.

"Voulez-vous mieux comprendre la nature et l'importance du sens théologique ? Prenez la Somme de saint Thomas; voyez cet ensemble formidable de questions dont elle traite, questions si diverses, mais toutes issues d'une même source divine et révélée, reliées toutes en un seul faisceau harmonieux; considérez la facilité, non seulement de se tromper, mais de se contredire, de perdre sa route, d'amasser sans ordre, dans un semblable dédale. Eh bien ! non, vous ne trouverez pas, dans la Somme théologique, une seule contradiction; on voit, on sent, on saisit cet ensemble harmonieux et admirable. Dans ce dédale, saint Thomas ne se perd pas comme les écrivains vulgaires; son immense panorama se déroule naturellement, dans l'ordre le plus vrai, ordre, de toute lumière, de toute grâce; ...pas une digression; tout est transition, lien, harmonie; pas une contradiction; tout s'enchaîne, s'accorde et s'explique réciproquement. Si vous rapprochez deux thèses quelconques, vous saisissez facilement entre elles le trait d'union, si éloignées parussent-elles l'une de l'autre - comme entre les membres les plus éloignés d'un corps organique les vaisseaux sanguins établissent une relation directe par le coeur, source commune de la vie."

(Abbé Augustin Aubry, Contre le modernisme, Etude de la Tradition, le sens catholique et l'esprit des Pères, Pierre Tequi Editeur, Gand 1927, réédité aux ESR, p. 164-166.)